L'attente|

Edward Hopper

Dans ses peintures, Edward Hopper représente l’attente privée de son objet : un employé de bureau face à une baie vitrée, une ouvreuse de cinéma inoccupée, un pompiste fixant la route, un couple sur le pas de leur porte, des individus immobiles dans une expectative indéfinie… Dans un entretien, il explique : « C’est probablement le reflet de ma propre solitude, je ne sais pas, ou tout simplement la condition humaine ». Le XIXème et le XXème siècle se sont reconnus dans l’expression de l’attente ; ils en ont multiplié les images tout en leur donnant un sens nouveau éminemment révélateur de la condition moderne : l’homme attend mais sans savoir quoi, c’est un « attendant » chronique.

« La version hoppérienne de l’attente, dans le spectre de l’art américain n’en reste pas moins très personnelle, et beaucoup plus complexe que les images pessimistes, mélodramatiques ou dénonciatrices de l’absence d’avenir que l’on trouve chez certains de ses compatriotes. Chez Hopper, l’attente se peint en tons vifs et lumineux, elle est associée à une grande clarté des couleurs et des formes. Se pourrait-il donc que les tableaux de Hopper soient des invitations à l’attente montrée comme son propre horizon,
sa propre fin ? »

Rien que par le titre qu’il donne à sa pièce, Samuel Beckett indique que l’important n’est pas Godot mais bien le « en attendant ». Il matérialise et montre véritablement sur scène l’activité d’ « attendre ». Comme Vladimir et Estragon, nous devons remplir, comme nous le pouvons, l’espace qui se situe entre un point A et un point B; entre notre naissance et notre mort.

Pour le metteur en scène d’ « En attendant Godot », Jean-Pierre Vincent, il est primordial que ses acteurs ne perdent jamais de leur esprit ce sentiment de l’attente. Chaque parole prononcée doit l’être dans le sentiment sourd et dans l’espace/temps de l’attente, et non dans une atmosphère angoissante de l’attente. C’est l’attente, elle même qui est représentée. Qui est Godot et pourquoi ils l’attendent ? Vladimir et Estragon ne le savent même pas vraiment eux-mêmes. C’est l’attente seule, sans objet, qui est au coeur de la
pièce.

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